RECITS DU GOUT: Baies de la baie
Par
Rodolphe Corrion
Ce conte fait partie d'une commande de l'association Culture & Hôpital dans le cadre expérimental d'un atelier multi-sensoriel Alzheimer.
Il était une fois
Dans un pays lointain où les kangourous côtoient les autruches
Un artiste
Il vivait dans une tribu où les hommes et les femmes se peignaient le corps des couleurs les plus vives
Cette pratique permettait à notre artiste de vivre car c’était lui qui était chargé de peindre les corps
Il y parvenait avec une grande habileté
Variant les motifs
Mêlant les couleurs
Et racontait sur les corps des membres de la tribu de véritables histoires
Un jour
On vint lui annoncer une terrible nouvelle
La carrière d’où provenait la terre rouge si utile pour confectionner les tons chauds des couleurs les plus vives
Cette carrière s’épuisait
Et bientôt il n’y aurait plus cette couleur disponible
Abattu
Notre artiste était inquiet pour son gagne-pain
Bien qu’il n’y soit pour rien
Il se disait que les gens renonceraient à se faire peindre sans tons rouges et orangés et qu’ils trouveraient d’autres façons de parer leur corps
Et déjà
Le sculpteur
Qui lui
Fabriquait des bijoux
Se frottait les mains
Car enfin pensait-il
Enfin les gens vont acheter mes bijoux plus qu’aller se faire peindre chez l’autre
Cette nuit-là il dormit profondément avec sérénité
Mais notre peintre lui passait une nuit blanche
Il sentait la fin de son art proche et cherchait comment sauver son métier
Il se résolut à partir le lendemain en voyage pour trouver une autre carrière de pierre rouge
Rodolphe Corrion
Ce conte fait partie d'une commande de l'association Culture & Hôpital dans le cadre expérimental d'un atelier multi-sensoriel Alzheimer.
Il était une fois
Dans un pays lointain où les kangourous côtoient les autruches
Un artiste
Il vivait dans une tribu où les hommes et les femmes se peignaient le corps des couleurs les plus vives
Cette pratique permettait à notre artiste de vivre car c’était lui qui était chargé de peindre les corps
Il y parvenait avec une grande habileté
Variant les motifs
Mêlant les couleurs
Et racontait sur les corps des membres de la tribu de véritables histoires
Un jour
On vint lui annoncer une terrible nouvelle
La carrière d’où provenait la terre rouge si utile pour confectionner les tons chauds des couleurs les plus vives
Cette carrière s’épuisait
Et bientôt il n’y aurait plus cette couleur disponible
Abattu
Notre artiste était inquiet pour son gagne-pain
Bien qu’il n’y soit pour rien
Il se disait que les gens renonceraient à se faire peindre sans tons rouges et orangés et qu’ils trouveraient d’autres façons de parer leur corps
Et déjà
Le sculpteur
Qui lui
Fabriquait des bijoux
Se frottait les mains
Car enfin pensait-il
Enfin les gens vont acheter mes bijoux plus qu’aller se faire peindre chez l’autre
Cette nuit-là il dormit profondément avec sérénité
Mais notre peintre lui passait une nuit blanche
Il sentait la fin de son art proche et cherchait comment sauver son métier
Il se résolut à partir le lendemain en voyage pour trouver une autre carrière de pierre rouge
L’aube à
peine venue
Le peintre était debout et partait
Il marcha tout droit
Car de toute façon
Personne dans sa tribu n’avait jamais voyagé et donc personne ne connaissait rien au-delà de quelques lieues à la ronde
Il marcha longtemps
Plusieurs jours
Vit pour la première fois des paysages étonnants
Et notamment
Une forêt
Immense
Hélas pour lui d’ailleurs
Car il cherchait plutôt une terre aride pour extraire de la roche tendre et non pas une forêt
Et un jour
Alors qu’il avait perdu tout espoir de trouver de la pierre rouge
Il déboucha sur une immense baie au bord de l’océan
Il n’avait jamais vu ça
Et presque de suite
Son œil fut attiré par un arbuste
Il s’approcha
Et découvrit que le fruit de cet arbuste était rouge
Le buisson était parsemé de petites boules rouge vif
Comme des perles de nacre couleur de sang
Il en cueillit une
L’écrasa entre ses doigts
Et ceux-ci se colorèrent immédiatement du rouge le plus pur
Il sut que c’était un signe
Ces petites boules pourraient servir de base pour ses peintures rouges
Il commença d’abord la cueillette
Mais écrasa bien vite les premières boules
Alors il réfléchit un moment
je prends quelques boules j’aurais vite épuisé ma réserve
Ce qu’il faut c’est prendre une branche de l’arbuste pour le planter sur ma terre j’aurai ainsi des boules rouges en abondance
Et c’est ce qu’il fit
Il prit une branche entière
La mit soigneusement dans une besace
Et rentra chez lui
Plusieurs jours encore pour rentrer et les habitants furent soulagés de le revoir
D’abord parce qu’il avait disparu
Ensuite parce qu’ils craignaient pour leurs parures
Ils questionnèrent le peintre sur son voyage mais celui-ci ne voulut rien dire
C’est une surprise affirma-t-il
Et il s’enferma chez lui
Mais le sculpteur se méfiait
Il avait eu l’espoir que le peintre eût quitté la tribu affligé par la perte de son rouge
Et comme il ne revenait pas
Il avait cru en être définitivement débarrassé
Intrigué par son retour
Il alla la nuit espionner le peintre chez lui
Comme il faisait noir
Il ne vit pas la couleur de l’arbuste que l’artiste plantait chez lui
Et notre sculpteur se dit simplement que cet original qui faisait du jardinage de nuit était devenu fou
Il ricana
Rentra chez lui satisfait
Et ne s’inquiéta plus de rien
Plusieurs lunes passèrent
Les dernières réserves de l’ancienne carrière de pierres rouges étaient épuisées
Et le peintre attendait avec impatience que l’arbuste donne des fruits
Ses peintures sur les corps étaient de moins en moins éclatantes
Et les gens commençaient à regarder de près les bijoux du sculpteur
Et puis un jour
Le peintre fit une première cueillette de boules rouges
Il pressa le tout
Et obtint une belle couleur pour peindre les corps de la tribu
Jamais ses créations n’avaient été plus belles
Ni le rouge plus puissant
Les gens étaient ravis
Et le sculpteur ne parvint pas à vendre le moindre bijou
Furieux il alla un soir chez le peintre pour l’interroger
Quel est ton secret pour ce rouge magnifique
La carrière est épuisée alors comment fais-tu
Vient voir dit le peintre sans se méfier
Regarde ce buisson que j’ai découvert lors de mon voyage
Il produit des petits fruits rouges
Ne sont-ils pas beaux
Et il en cueillit un
Le donna au sculpteur pour qu’il l’examine
Etonnant dit ce dernier
Puis
Par réflexe
Il croqua dedans
Pouah son goût est infâme
J’ignore le goût qu’il a dit le peintre
Je ne l’ai jamais goûté
Je ne l’utilise que pour les peintures
Mais le sculpteur commença à se sentir mal
Je tremble dit-il
Ce fruit est un poison
Tu crois répondit le peintre
Oui
Et tu le savais
Tu l’as fait exprès pour que je morde dedans et sois empoisonné
Mais pas du tout j’ignorais que tu mordrais dedans
Alors le sculpteur
Affaibli mais malicieux
Sortit de chez le peintre et alerta la tribu
Au secours
Le peintre a voulu m’empoisonner
Il vous peint le corps avec du poison
Au secours
Bientôt la tribu était autour du sculpteur et demandait au peintre des explications
Celui-ci leur expliqua tout
Mais le doute était installé
Pour vérifier que le fruit était bien un poison
Ils en donnèrent à manger à quelques petits animaux qu’ils trouvèrent
Et tous en périrent presque de suite
Alors ce fut la panique dans la tribu
Mais comme personne ne trouvait d’argument pour que le peintre veuille empoisonner toute la tribu
Ils ne condamnèrent que sa négligence
Tu as failli tous nous empoisonner avec un fruit dangereux
Pour réparer ta faute tu devras trouver un autre moyen d’avoir du rouge
Et sans danger
Tu partiras demain à l’aube et ne reviendras qu’avec l’objet de ta quête ou tu ne reviendras jamais
Et le lendemain
Le peintre partit sous l’œil grave de la tribu et de la joie non dissimulée du sculpteur
Ne sachant pas où aller
Il retourna vers la baie aux baies rouges
Espérant y trouver quelque chose d’autres qui feraient l’affaire
Il marcha plusieurs jours
Et s’approchait de la fameuse baie
Mais quand il sortit de la forêt et vit la mer
Il n’en crut pas ses yeux
Il y avait sur l’océan des grandes maisons de bois
Et sur la plage de petites maisons
Et partout
Des hommes à la peau toute pâle
Il se cacha derrière les arbres pour observer ces créatures étranges
Il attendit longtemps
Mais un homme blanc qui s’était aventuré dans la forêt pour chasser du gibier le trouva caché et pointa un fusil sur lui
Notre peintre n’avait jamais vu de fusil
Apeuré par la présence de l’homme blanc il commença à s’éloigner
Mais l’autre tira un coup de feu en l’air pour lui faire voir que l’arme était dangereuse
Pétrifié
Le peintre se laissa conduire parmi les autres hommes blancs
Pour ces derniers qui venaient de loin
Cet homme à la peau plus foncée et aux peintures sur le corps était une étrangeté
Ils le regardaient
Ricanaient
Parlaient entre eux
Notre artiste en profitait pour regarder ce que les hommes blancs avaient apporté sur ces maisons flottantes
D’étranges animaux
Et des plantes inconnues
Parmi elles
Plusieurs petits arbustes avec des fruits rouges
Et parfois
Il voyait les hommes blancs piocher dans les arbustes pour prendre un fruit rouge et le manger
Le peintre s’approcha alors d’un arbuste
Les hommes blancs ne bougèrent plus prêts à ouvrir le feu si nécessaire
Le peintre cueillit un fruit
Le mit dans sa bouche
Les hommes blancs étaient comme des statues
Le peintre écarquilla les yeux
Fut émerveillé du goût de ces fruits
Et il poussa un long
Mmmmm
Alors
Après un silence étonné
Les hommes blancs éclatèrent de rire
L’atmosphère détendue
Le peintre prit un autre fruit l’écrasa entre ses doigts et fit un grand trait rouge sur son bras
Puis il regarda les hommes blancs
Montra son bras
Sourit
Les autres rirent à nouveau à gorges déployées
Et ainsi toute la journée le peintre découvrit les merveilles venues de loin des hommes blancs et se lia d’amitié avec eux
Le lendemain
Il prit des branches d’arbustes avec des fruits rouges et repartit vers sa tribu
Résolu de faire du rouge avec ces fruits délicieux il eut tout le voyage du retour pour réfléchir
Et quand il arriva au sein de sa tribu il réunit tout le monde
J’ai découvert d’autres fruits pour ma peinture
Je peux donc en refaire
Et pour vous prouver que ce n’est pas dangereux voyez plutôt
Il saisit des fruits et les mit dans sa bouche
La tribu l’acclama mais il les arrêta
Mais comme vous voyez ces fruits sont comestibles et même délicieux
Je vous propose de faire comme moi et de les goûter
Vous verrez par vous-même si vous voulez les manger ou les étaler sur vos visages
Et tout le monde goûta les fruits et tous furent émerveillés
Il y eut comme un brouhaha de joie que le peintre dissipa encore
Alors voyez ce que je vous propose
Des fruits si délicieux seront bien mieux dans notre bouche qu’en ornement sur nos corps
Nous pouvons continuer les peintures mais je propose de les faire blanches en hommage aux hommes qui m’ont procuré ces fruits
Et comme je conçois que des peintures blanches seront de piètres ornements je propose que notre sculpteur nous fasse à tous de beaux bijoux
Dans l’assemblée
Le sculpteur lui avait boudé la fête
Il était présent mais faisait depuis le début une tête triste et renfrognée
En entendant les propos du peintre
Son visage s’illumina
Et tous le regardèrent
Il bredouilla
J’accepte mais à une seule condition
Laquelle demanda l’assemblée
C’est que peintures blanches et bijoux soient en harmonie
De ce jour le peintre et le sculpteur ne se quittèrent plus
Ils ornaient le corps des gens ensemble
Et toute la tribu profita des bienfaits réjouissant de ces étranges petits fruits rouges venus de l’autre bout du monde
Le peintre était debout et partait
Il marcha tout droit
Car de toute façon
Personne dans sa tribu n’avait jamais voyagé et donc personne ne connaissait rien au-delà de quelques lieues à la ronde
Il marcha longtemps
Plusieurs jours
Vit pour la première fois des paysages étonnants
Et notamment
Une forêt
Immense
Hélas pour lui d’ailleurs
Car il cherchait plutôt une terre aride pour extraire de la roche tendre et non pas une forêt
Et un jour
Alors qu’il avait perdu tout espoir de trouver de la pierre rouge
Il déboucha sur une immense baie au bord de l’océan
Il n’avait jamais vu ça
Et presque de suite
Son œil fut attiré par un arbuste
Il s’approcha
Et découvrit que le fruit de cet arbuste était rouge
Le buisson était parsemé de petites boules rouge vif
Comme des perles de nacre couleur de sang
Il en cueillit une
L’écrasa entre ses doigts
Et ceux-ci se colorèrent immédiatement du rouge le plus pur
Il sut que c’était un signe
Ces petites boules pourraient servir de base pour ses peintures rouges
Il commença d’abord la cueillette
Mais écrasa bien vite les premières boules
Alors il réfléchit un moment
je prends quelques boules j’aurais vite épuisé ma réserve
Ce qu’il faut c’est prendre une branche de l’arbuste pour le planter sur ma terre j’aurai ainsi des boules rouges en abondance
Et c’est ce qu’il fit
Il prit une branche entière
La mit soigneusement dans une besace
Et rentra chez lui
Plusieurs jours encore pour rentrer et les habitants furent soulagés de le revoir
D’abord parce qu’il avait disparu
Ensuite parce qu’ils craignaient pour leurs parures
Ils questionnèrent le peintre sur son voyage mais celui-ci ne voulut rien dire
C’est une surprise affirma-t-il
Et il s’enferma chez lui
Mais le sculpteur se méfiait
Il avait eu l’espoir que le peintre eût quitté la tribu affligé par la perte de son rouge
Et comme il ne revenait pas
Il avait cru en être définitivement débarrassé
Intrigué par son retour
Il alla la nuit espionner le peintre chez lui
Comme il faisait noir
Il ne vit pas la couleur de l’arbuste que l’artiste plantait chez lui
Et notre sculpteur se dit simplement que cet original qui faisait du jardinage de nuit était devenu fou
Il ricana
Rentra chez lui satisfait
Et ne s’inquiéta plus de rien
Plusieurs lunes passèrent
Les dernières réserves de l’ancienne carrière de pierres rouges étaient épuisées
Et le peintre attendait avec impatience que l’arbuste donne des fruits
Ses peintures sur les corps étaient de moins en moins éclatantes
Et les gens commençaient à regarder de près les bijoux du sculpteur
Et puis un jour
Le peintre fit une première cueillette de boules rouges
Il pressa le tout
Et obtint une belle couleur pour peindre les corps de la tribu
Jamais ses créations n’avaient été plus belles
Ni le rouge plus puissant
Les gens étaient ravis
Et le sculpteur ne parvint pas à vendre le moindre bijou
Furieux il alla un soir chez le peintre pour l’interroger
Quel est ton secret pour ce rouge magnifique
La carrière est épuisée alors comment fais-tu
Vient voir dit le peintre sans se méfier
Regarde ce buisson que j’ai découvert lors de mon voyage
Il produit des petits fruits rouges
Ne sont-ils pas beaux
Et il en cueillit un
Le donna au sculpteur pour qu’il l’examine
Etonnant dit ce dernier
Puis
Par réflexe
Il croqua dedans
Pouah son goût est infâme
J’ignore le goût qu’il a dit le peintre
Je ne l’ai jamais goûté
Je ne l’utilise que pour les peintures
Mais le sculpteur commença à se sentir mal
Je tremble dit-il
Ce fruit est un poison
Tu crois répondit le peintre
Oui
Et tu le savais
Tu l’as fait exprès pour que je morde dedans et sois empoisonné
Mais pas du tout j’ignorais que tu mordrais dedans
Alors le sculpteur
Affaibli mais malicieux
Sortit de chez le peintre et alerta la tribu
Au secours
Le peintre a voulu m’empoisonner
Il vous peint le corps avec du poison
Au secours
Bientôt la tribu était autour du sculpteur et demandait au peintre des explications
Celui-ci leur expliqua tout
Mais le doute était installé
Pour vérifier que le fruit était bien un poison
Ils en donnèrent à manger à quelques petits animaux qu’ils trouvèrent
Et tous en périrent presque de suite
Alors ce fut la panique dans la tribu
Mais comme personne ne trouvait d’argument pour que le peintre veuille empoisonner toute la tribu
Ils ne condamnèrent que sa négligence
Tu as failli tous nous empoisonner avec un fruit dangereux
Pour réparer ta faute tu devras trouver un autre moyen d’avoir du rouge
Et sans danger
Tu partiras demain à l’aube et ne reviendras qu’avec l’objet de ta quête ou tu ne reviendras jamais
Et le lendemain
Le peintre partit sous l’œil grave de la tribu et de la joie non dissimulée du sculpteur
Ne sachant pas où aller
Il retourna vers la baie aux baies rouges
Espérant y trouver quelque chose d’autres qui feraient l’affaire
Il marcha plusieurs jours
Et s’approchait de la fameuse baie
Mais quand il sortit de la forêt et vit la mer
Il n’en crut pas ses yeux
Il y avait sur l’océan des grandes maisons de bois
Et sur la plage de petites maisons
Et partout
Des hommes à la peau toute pâle
Il se cacha derrière les arbres pour observer ces créatures étranges
Il attendit longtemps
Mais un homme blanc qui s’était aventuré dans la forêt pour chasser du gibier le trouva caché et pointa un fusil sur lui
Notre peintre n’avait jamais vu de fusil
Apeuré par la présence de l’homme blanc il commença à s’éloigner
Mais l’autre tira un coup de feu en l’air pour lui faire voir que l’arme était dangereuse
Pétrifié
Le peintre se laissa conduire parmi les autres hommes blancs
Pour ces derniers qui venaient de loin
Cet homme à la peau plus foncée et aux peintures sur le corps était une étrangeté
Ils le regardaient
Ricanaient
Parlaient entre eux
Notre artiste en profitait pour regarder ce que les hommes blancs avaient apporté sur ces maisons flottantes
D’étranges animaux
Et des plantes inconnues
Parmi elles
Plusieurs petits arbustes avec des fruits rouges
Et parfois
Il voyait les hommes blancs piocher dans les arbustes pour prendre un fruit rouge et le manger
Le peintre s’approcha alors d’un arbuste
Les hommes blancs ne bougèrent plus prêts à ouvrir le feu si nécessaire
Le peintre cueillit un fruit
Le mit dans sa bouche
Les hommes blancs étaient comme des statues
Le peintre écarquilla les yeux
Fut émerveillé du goût de ces fruits
Et il poussa un long
Mmmmm
Alors
Après un silence étonné
Les hommes blancs éclatèrent de rire
L’atmosphère détendue
Le peintre prit un autre fruit l’écrasa entre ses doigts et fit un grand trait rouge sur son bras
Puis il regarda les hommes blancs
Montra son bras
Sourit
Les autres rirent à nouveau à gorges déployées
Et ainsi toute la journée le peintre découvrit les merveilles venues de loin des hommes blancs et se lia d’amitié avec eux
Le lendemain
Il prit des branches d’arbustes avec des fruits rouges et repartit vers sa tribu
Résolu de faire du rouge avec ces fruits délicieux il eut tout le voyage du retour pour réfléchir
Et quand il arriva au sein de sa tribu il réunit tout le monde
J’ai découvert d’autres fruits pour ma peinture
Je peux donc en refaire
Et pour vous prouver que ce n’est pas dangereux voyez plutôt
Il saisit des fruits et les mit dans sa bouche
La tribu l’acclama mais il les arrêta
Mais comme vous voyez ces fruits sont comestibles et même délicieux
Je vous propose de faire comme moi et de les goûter
Vous verrez par vous-même si vous voulez les manger ou les étaler sur vos visages
Et tout le monde goûta les fruits et tous furent émerveillés
Il y eut comme un brouhaha de joie que le peintre dissipa encore
Alors voyez ce que je vous propose
Des fruits si délicieux seront bien mieux dans notre bouche qu’en ornement sur nos corps
Nous pouvons continuer les peintures mais je propose de les faire blanches en hommage aux hommes qui m’ont procuré ces fruits
Et comme je conçois que des peintures blanches seront de piètres ornements je propose que notre sculpteur nous fasse à tous de beaux bijoux
Dans l’assemblée
Le sculpteur lui avait boudé la fête
Il était présent mais faisait depuis le début une tête triste et renfrognée
En entendant les propos du peintre
Son visage s’illumina
Et tous le regardèrent
Il bredouilla
J’accepte mais à une seule condition
Laquelle demanda l’assemblée
C’est que peintures blanches et bijoux soient en harmonie
De ce jour le peintre et le sculpteur ne se quittèrent plus
Ils ornaient le corps des gens ensemble
Et toute la tribu profita des bienfaits réjouissant de ces étranges petits fruits rouges venus de l’autre bout du monde